[Criminologie] Abus sexuel ritualisé sataniste
En postant une fiche sur le film regression , j’ai fait quelques recherches sur wikipedia et j’ai trouvé les infos intéressantes, je m’en vais vous les partager 🙂
L’abus sexuel ritualisé sataniste (ASRS) serait un abus sexuel commis dans un cadre rituel d’inspiration sataniste ou luciférienne, suivi ou non de meurtre, sur des personnes fragiles, souvent des enfants.
Il s’agit d’une panique morale composée de plus de 12 000 cas non fondés d’abus rituels sataniques commençant aux États-Unis dans les années 1980, se propageant dans de nombreuses régions du monde à la fin des années 90 et persistant aujourd’hui.
La notion est née en 1980, suite à la publication d’un ouvrage relatant les entretiens entre un psychiatre canadien et sa patiente, qui témoigne sous hypnose des abus rituels sataniques auxquels elle a pris part.
Dans sa forme la plus extrême, les allégations impliquent une conspiration d’un culte satanique mondial qui inclut l’élite mondiale riche et puissante dans laquelle des enfants sont enlevés ou élevés pour des sacrifices humains, la pornographie et la prostitution.
Presque tous les aspects de l’abus rituel sont controversés, y compris sa définition, la source des allégations et leurs preuves, les témoignages des victimes présumées et les affaires judiciaires impliquant les allégations et les enquêtes criminelles.
La panique a touché les avocats, les thérapeutes et les travailleurs sociaux qui ont traité des allégations d’abus sexuels sur des enfants.
Le terme « abus rituel » a été employé pour la première fois, en 1980, par un psychiatre canadien nommé Lawrence Pazder, qui définit ainsi le phénomène : « Attaques physiques, émotionnelles, mentales et spirituelles répétitives, combinées avec l’usage systématique de symboles, de cérémonies et de manipulations à des fins malveillantes. » Pazder publie cette année l’ouvrage Michelle Remembers, co-écrit avec sa patiente (et future épouse) Michelle Smith.
L’abus rituel est défini dans le Dictionnaire de la psychologie comme : « Une méthode de contrôle des personnes de tout âges consistant en de mauvais traitements physiques, sexuels et psychologiques par l’utilisation de rituels ».
En Grande-Bretagne, le « Working Together Under the Children Act », un document du département de la Santé, destiné à la protection de l’enfance, donne cette définition en 1991 :
« “Abus organisé” est un terme générique qui concerne des abus impliquant un certain nombre d’agresseurs, un certain nombre d’enfants, et qui englobe généralement différentes formes d’abus. […] Un large éventail d’activités sont couvertes par ce terme, allant des petits réseaux de pédophilie ou de pornographie, souvent mais non systématiquement organisés pour faire du profit, dont la plupart des participants se connaissent les uns les autres, aux grands réseaux d’individus ou de familles qui peuvent être répartis plus largement et dans lesquels tous les membres ne se connaissent pas forcément entre eux.
Certains groupes organisés peuvent avoir un comportement étrange et ritualisé, parfois associé avec des “croyances” particulières.
Cela peut être un puissant mécanisme pour terrifier les enfants maltraités afin qu’ils ne divulguent pas ce qu’ils subissent. »
Dans son « Guide national pour la protection de l’enfance », le site officiel du gouvernement écossais diffuse l’information suivante concernant les abus rituels :
« Certains enfants peuvent être soumis à des problèmes de protection qui s’étendent au-delà de leur environnement de soins immédiats en raison de l’abus rituel.
L’abus rituel peut être défini comme des agressions sexuelles, physiques et psychologiques, d’une manière organisée, systématique et durant une longue période de temps.
Cela implique l’utilisation de rituels, avec ou sans système de croyances et généralement avec plusieurs agresseurs.
Les abus rituels commencent généralement durant la petite enfance et impliquent l’utilisation de modèles d’apprentissage et de développement visant à renforcer les abus et à réduire au silence les victimes [Définition par Ritual Abuse Network Scotland].
Les agresseurs concernés peuvent agir de concert pour abuser les enfants, ou bien utiliser un cadre institutionnel ou un poste d’autorité pour les abus.
Cela peut se produire à la fois dans le cadre d’un réseau familial, communautaire ou dans le cadre institutionnel, comme les maisons de soin ou les écoles.
De tels abus sont profondément traumatiques pour les enfants qui y sont impliqués. »
Les allégations qui surgissent ensuite dans une grande partie des États-Unis concernent des rapports d’abus physiques et sexuels de personnes dans le cadre de rituels occultes ou sataniques.
Belgique
En 2002, en parallèle de l’affaire Dutroux, Régina Louf accuse Michel Nihoul et d’autres personnes, organisées en réseau de pédocriminalité meurtrier, d’avoir perpétré des abus sexuels ritualisés satanistes.
La justice abandonne les poursuites devant l’absence de preuves pour étayer les accusations.
États-Unis
Lors de l’affaire de l’établissement préscolaire McMartin, qui se révéla totalement basée sur des accusations infondées, la dissimulation d’abus sexuels ritualisés satanistes généralisés fut au centre de l’enquête, comme durant le scandale Franklin.
France
En 1997, Samir Aouchiche raconte dans L’Enfant sacrifié à Satan ses persécutions par une organisation dénommée « Alliance Kripten » (« Un réseau pédophile mâtiné d’influences satanistes et néonazies », selon VSD).
Si Aouchiche a bien été victime de pédophiles, son récit concernant les rituels satanistes n’est pas étayé.
Véronique Liaigre et ses deux sœurs sont victimes de viols et de viols aggravés entre 1984 et 1997 commis par leurs parents.
Véronique Liaigre évoque des abus sexuels ritualisés satanistes, et fait état de tortures et de sacrifice humain, mais la justice ne condamne ses parents, Georges Liaigre et Marie-Pierre Collasseau, que pour les viols.
Royaume-Uni
Un certain Michael Horgan, lié au député Cyril Smith, a été accusé d’avoir perpétré six cas d’abus sexuels ritualisés satanistes en 1992.
Il est condamné pour cela à dix ans de prison en 2013.
Italie
En 1998 éclate l’affaire des diables de la région de Basse-Modène, en Émilie-Romagne, dans laquelle, entre 1998 et 2007, une vingtaine de personnes sont arrêtées pour des actes pédophiles impliquant des rites satanistes.
Pays-Bas
Une enquête sur les abus rituels dans les années 1990 est lancée par la justice, à la suite d’alertes transmises par des travailleurs sociaux.
Le groupe de travail spécial chargé par la justice néerlandaise d’investiguer sur le sujet conclut après six mois à l’absence de preuves démontrant l’existence de ces abus, en reconnaissant néanmoins n’avoir pas eu le temps d’enquêter en profondeur sur l’ensemble des cas rapportés.
Le groupe de travail recommande la création d’un pôle de spécialistes pour étendre, autant dans la littérature que dans la pratique, les recherches à ce sujet – mais ce pôle n’est pas créé.
Peu après, un ouvrage discréditant la thérapie de la récupération de la mémoire paraît, décrédibilisant par là une grande partie des cas d’abus rituels rapportés.
En 1999, une équipe de police est créée pour traiter les crimes sexuels : la LEBZ (Landelijke Expertisegroep Bijzondere Zedenzaken).
On adresse à cette équipe tout rapport d’abus sexuels pouvant se rapporter à des abus rituels.
En 2020, selon les journalistes d’investigation de l’émission Argos (NPO Radio 1), aucune preuve n’a pu être découverte pour confirmer l’existence d’abus rituels ; la LEBZ travaille désormais à enquêter sur les fausses accusations de ce type.
D’une part, de faux souvenirs ont pu être produits lors de séances d’hypnothérapie.
D’autre part, certains témoins souffrent de trouble dissociatif de l’identité.
L’emballement autour de ces accusations est assimilable à une théorie du complot produite par la panique morale
En dehors d’un contexte scientifique, on parle aussi en français de croisade morale, de vindicte populaire, de lynchage médiatique ou de cirque médiatique.
Définition par Stanley Cohen
Selon Stanley Cohen, une « panique morale » surgit quand « une condition, un événement, une personne ou un groupe de personnes est désigné comme une menace pour les valeurs et les intérêts d’une société ».
Le sociologue propose également qu’on reconnaisse dans toute panique morale deux acteurs majeurs : les « chefs moraux » (« moral entrepreneurs »), initiateurs de la dénonciation collective ; et les « boucs-émissaires » (« folk devils »), personnes ou groupes désignés à la vindicte.
Des chercheurs spécialisés dans la culture numérique, tels Henry Jenkins aux Etats-Unis, ou Hervé Le Crosnier, maître de conférence à l’université de Caen, utilisent également l’expression de « panique morale » pour désigner la peur disproportionnée des médias et d’une partie de la population face à la transformation induite par tout changement technologique, perçue comme un grand danger à la portée de chacun.
Les paniques morales sont généralement nourries par la couverture médiatique disproportionnée d’une controverse.
L’hystérie collective peut être une composante de ces mouvements, mais la panique morale s’en distingue parce que constitutivement interprétée en termes de moralité.
Elle s’exprime habituellement davantage en termes d’offense ou d’outrage qu’en termes de peur.
Les paniques morales, telles que définies par Stanley Cohen, s’articulent autour d’un élément perçu comme un danger pour une valeur ou une norme défendue par la société ou mise en avant par les médias ou institutions.
L’un des aspects les plus marquants des paniques morales est leur capacité à s’auto-entretenir.
La médiatisation d’une panique tendant à légitimer celle-ci et à faire apparaître le problème comme bien réel et plus important qu’il ne l’est en pratique.
La médiatisation de la panique engendrant alors un accroissement de la panique.
Les effets de ce genre de réactions sont par ailleurs nombreux dans les domaines politique et juridique.
Origine
L’expression de « panique morale » a été inventé par Stanley Cohen pour décrire la couverture médiatique des Mods et des Rockers au Royaume-Uni dans les années soixante.
On fait remonter aux Middletown Studies, conduites en 1925 pour la première fois, la première analyse en profondeur de ce phénomène : les chercheurs découvrirent que les communautés religieuses américaines et leurs chefs locaux condamnaient alors les nouvelles technologies comme la radio ou l’automobile en arguant qu’elles faisaient la promotion de conduites immorales.
Un pasteur interrogé dans cette étude désignait ainsi l’automobile comme une « maison close sur roues » et condamnait cette invention au motif qu’elle donnait aux citoyens le moyen de quitter la ville alors qu’ils auraient dû être à l’église.
Cependant, dès les années 30, Wilhem Reich avait développé le concept de peste émotionnelle.
Travaux universitaires à partir du concept
Pour Michelle Perrot, historienne entre autres du mouvement ouvrier, le « phénomène apache » (et bien avant mohicans, alphonses, marlous, et autres bandes juvéniles parisiennes) de par l’engagement des médias, des feuilletonistes, des politiques, des religieux relève en bonne partie de la panique morale.
Surtout, si on tient compte de l’histoire agitée et des transformations sociale de la Belle-Epoque.
Avant tout, cette « panique morale » est liée au goût du sensationnel des faits-diversiers et aux mouvements politiques de l’époque.
La confusion entre d’une part mouvement ouvrier et anarchistes et, d’autre bandes apaches, à tort ou à raison, était assez courante et entretenue dans la presse de l’époque.
L’exemple de Liabeuf est assez caractéristique de ce phénomène.
Le travail La panique médiatique entre déviance et problème social : vers une modélisation sociocognitive du risque de Divina Frau-Meigs revient sur le phénomène des paniques morales.
L’autrice s’inscrit dans la continuité de la pensée d’Ulrich Beck selon laquelle nous sommes, à l’heure de la mondialisation, dans une « société de risques » non plus par rapport à la nature, mais bien par rapport au développement rapide des technologies.
Les technologies introduisent de la méfiance par rapport au problème constaté (théorie du complot ; développement de la cyberviolence…).
Le risque est ancré dans notre quotidien, et cela implique une bonne connaissance des outils technologiques pour en prévenir les dérives du net, afin de réduire le sentiment de peur et de méfiance qui se développe vis-à-vis des médias.
Les risques liés aux paniques morales sont décrits comme multiple.
Les plus importants sont de ne plus croire ce qui est rapporté par les médias ou même de ne plus croire les informations justes, constituant ainsi le terreau du complotisme qui se répand au XXIe siècle avec la prédominance des échanges sur internet.
C’est aussi mettre sur un même plan d’importance des éléments pourtant très différents.
Ainsi, certaines paniques dites « mineures » par Divan Frau-Meigs pourraient se retrouver à une même importance que des paniques morales majeures (le traitement de l’obésité au même niveau que la peur du terrorisme par exemple).
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